LE ROCHER DE PIERRELATTE


Pierrelatte (26)

Maître d’ouvrage : Mairie de Pierrelatte


Objet : Concours lauréat / AMO aménagement d'un espace culturel et de spectacle en site naturel classé


Surface : 4ha


Coût mission : 130 ht / estimation travaux 6 700 ke


Équipe : Notus mandataire, Créa factory scénographe, Teloa, Cécile Raymond patrimoine, Seca bet

Le site du Rocher à Pierrelatte est surprenant. La déambulation dans la ville ne laisse pas forcément présager de sa morphologie, de son imposante force et de l’évidente nécessité d’en faire un espace d’expression culturelle.

Mais plus encore que le Rocher, le château d’eau est saisissant. Par son étrangeté, sa forme, qui rappelle plus un barrage hydraulique qu’un château d’eau classique; son incongruité le rend singulier.

Il nous est apparu rapidement que ce n’était pas une structure à cacher, à dissimuler, mais au contraire qu’elle pouvait être un point focal. Que ce mur devenait une sorte de centralité qui pouvait susciter toutes les interrogations et qui pouvait exalter l’imagination.

Le futur projet placera la question « qu’y a t-il derrière ce mur ? » comme un fil rouge qui, à l’évidence, viendra à l’esprit d’un visiteur extérieur découvrant Pierrelatte, mais aussi pour les Pierrelatins qui le verront différemment.

Oui, Gargantua a jeté le caillou insidieusement placé dans sa chaussure et a ainsi créé le Rocher. Mais n’aurait-il pas aussi créé avec Merlin ce mur pour y dissimuler de précieux secrets ? Nous proposons de percer la muraille et de faire découvrir aux publics «La Fabrique des animaux extraordinaires».

Rabelais dans ses différents livres met en scène un bestiaire satirique, animaux hybrides, animaux extraordinaires aux caractéristiques fantastiques : Grand jument, dragons, lièvres cornus, canes bâtées, oisons bridés, etc. peuplent l’univers rabelaisien.

Cette rémanence des images animales, cet entêtement de la figure marginale à menacer l’ordre établi, sont les conditions sine qua non d’une esthétique de la liberté, travaillant sans relâche, avec brutalité et éclat, la définition de l’homme.

Toujours décrochée, l’image animale introduirait, au coeur de la narration, un espace de jeu, permettant la redéfinition perpétuelle de l’homme…des hybrides outrées pour faire triompher la force de l’imagination.

Cette thématique du bestiaire animalier de Rabelais présente plusieurs avantages directs et locaux:

Le lien avec les légendes rabelaisiennes, donnant ainsi plus de densité au mythe du rocher;

Le lien avec la ferme aux crocodiles ; le crocodile tient une place à part dans le mythologie et les croyances. Il porte ses deux visages qui permettent de basculer de la réalité expliquée (le ferme aux crocodiles) aux légendes et aux fantasmes (l’animal serait proche du dragon, comme Grand Jument). Porteur du monde, divinité nocturne et lunaire, maître des eaux primordiales, le crocodile, dont la voracité est celle de la nuit dévore chaque soir le soleil. Dans certaines divinités, le Crocodile est le gardien et le protecteur de toute la connaissance. En tant que gardien ou protecteur, il protège contre les jugements hâtifs et les solutions irréfléchies et avertit contre la rigidité et l’inflexibilité (thème central chez Rabelais).

Le lien avec le rocher, son relief et ses formes, qui suivant un travail scénographique approprié (lumières, vidéo-projection) devient la surface dévoilant des formes fantastiques d’animaux cachés.

 Mais aussi la possibilité d’engendrer des variantes et des sous-thèmes très étendus :

Les mythologies du monde entier où le bestiaire animal intervient (grecque, scandinave, celte, aztèque, etc.);

Les univers fantastiques de l’anticipation, de l’héroic fantasy et de la science-fiction (cinéma, littérature, arts visuels, etc.);

Les mondes macro et micro;

Le monde des géants (Gulliver), etc.

Enfin, derrière la satyre et la critique, Rabelais à travers son œuvre participe du courant de l’humanisme de la Renaissance et rappelle en permanence un certain nombre de principes comme ceux de liberté et de justice qui sont devenus des piliers de nos valeurs sociétales. La culture en réponse à l’arbitraire, la fantaisie, la dérision et la parodie face au rigorisme.